NEAL BLACK AND THE HEALERS: Before Daylight (2014)
Le Texas a toujours été la patrie des pistoleros de fameuse mémoire et des « guitar slingers » plus rapides que leur ombre. Neal Black, natif de San Antonio, est à rajouter à la longue liste des fabuleux gratteux texans tels Johnny Winter, Stevie Ray et Jimmie Vaughan, Billy Gibbons, Rusty Burns, Van Wilks, Freddie King, Clarence Gatemouth Brown et bien d’autres encore. Son dernier album en date nous en fournit férocement la preuve. Dès le début, Neal Black nous transporte au Lone Star State avec sa voix gorgée de soleil et de bourbon ainsi que son style de guitare très personnel, bien que marqué par le style texan. On commence avec « Jesus And Johnny Walker », une « rock ballad » qui nous envoie un solo dans la lignée des grands du Texas. « Hangman’s Tree », un jump blues teinté de country, nous conte la sombre histoire d’un pauvre gars qui finit au bout d’une corde. Sa petite amie lui a piqué son flingue pour buter un type et lui colle le meurtre sur le dos. Le juge véreux, qui se révèle être l’amant de la petite garce, demande au suspect un paquet de fric pour lui éviter la corde, sachant que le mec ne possède pas un cent. De sa cellule, notre héros voit son ancienne fiancée danser avec le juge devant l’arbre du pendu. Une bonne fable à la mode texane. Au passage, Neal Black en profite pour poser un constat social en affirmant qu’un pauvre naît déjà coupable et qu’une fois enfermé, on jette au loin la clé (« The poor boy is always born guilty. They lock him up and throw away the key »).
« The Peace Of Darkness », une lente ballade acoustique avec dobro et mandoline, sonne très sudiste (dans le style de l’album « Endangered species » de Lynyrd Skynyrd). Un surprenant solo d’accordéon vient ajouter une coloration inattendue. « Mama’s Baby », un bon shuffle/rock texan, balance bien. L’intro de guitare nous le montre d’emblée et le solo (mélange de Rusty Burns et de Van Wilks) est exécuté de main de maître. «The Same Color », un slow bluesy à la Gary Moore, délivre un message de tolérance universelle en affirmant que nous sommes tous de la même couleur devant la souffrance (« We Are The Same Color When We Suffer »). Le solo de guitare (cocktail de Gary Moore, de Rusty Burns et de Larry Miller) nous en met plein la vue et les oreilles. La technique au service du feeling !
La construction mélodique de « The Road Back Home » rappelle le Charlie Daniels Band du début des seventies (« Birmingham Blues » par exemple). Quant au solo, il décoiffe ! « Before Daylight », une ballade à la Eagle-Eyed Cherry, est dotée d’un splendide harmonica (comparable à celui de Norton Buffalo sur « Special Someone » du Marshall Tucker Band) et d’une slide délicate et mélodique (écoutez le solo). Un morceau fait pour rouler sur une « highway ». Neal Black reprend également « Goin’ Down The Road » en lente ballade country blues. Le solo est rempli d’émotion et les guitaristes se réjouiront à son écoute. En plus, nous avons droit à un sympathique solo de mandoline. Pour la petite histoire, il faut souligner que le Marshall Tucker Band avait repris ce chant traditionnel sur son album « Gospel » en 1999. L’ombre de Dr John plane sur « American Dream », un blues style New Orleans avec seulement un piano et un harmonica. L’album s’achève sur « Dead By Now », un blues rock syncopé qui fleure bon le Texas avec une guitare effilée comme un rasoir et un dialogue de folie entre l’harmonica et la six cordes. Très fort !
Un guitariste doué vient donc de sortir une galette endiablée dans la grande tradition texane en y ajoutant son propre style. Qu’attendez-vous ? Jetez-vous dessus et profitez-en !
The eyes of Texas are upon you!
Olivier Aubry